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Kim Paquette dirige les opérations de l’entreprise de transport par autobus éponyme, fondée par son père Robert, à St-Eustache. Fermeture subite des écoles et reprise reportée en septembre, annulation des transports pour camps de jour et pénurie de main-d’œuvre à venir. Malgré des défis qui se succèdent, la jeune entrepreneuse a pris le temps de nous parler, en gardant le sourire.

Via Prévention

Dans la région de St-Eustache le transport d’écoliers n’a pas repris et rien est sûr pour les mois à venir. Comment vous préparer ?

Kim Paquette

En fait nous avons repris le transport par berline cette semaine avec seulement deux véhicules. Mais il se pourrait qu’on reprenne plus d’activités avec l’ouverture des camps pédagogiques, ce que vient d’annoncer le gouvernement. On est sur le stand-by, en attente de la liste d’élèves, cette semaine. Nous sommes fin prêts à reprendre.

V.P.

Comment vous êtes-vous préparés ?

K.P.
V.P.

Cela sera utile pour les camps de jour, non ?

K.P.

Ils ont tous été annulés pour cet été. Cela aurait été un de nos plus gros étés, car nous sommes allés chercher de nouveaux clients dans la région. Des camps de jour pourraient se tenir, mais il n’y aura pas de sorties à La Ronde, aux glissades d’eau, à arbre en arbre, etc. Donc, plus besoin d’autobus. Sont également annulées les sorties sportives, les sorties familiales. Tout ce qui était prévu n’aura pas lieu.

V.P.

Existe-t-il d’autres débouchés ? D’autres possibilités de contrats ?

K.P.

C’est vraiment le transport urbain qui monopolise notre temps. À l’exception de deux berlines pour le scolaire. On se tient prêts pour la semaine prochaine, avec l’annonce des camps pédagogiques à partir de lundi. On attend les infos de la commission scolaire pour savoir quels types de véhicules mettre sur la route, minibus, gros autobus, etc.

V.P.

Avez-vous reçu des appels de parents inquiets pour la santé de leurs enfants ?

K.P.

Non, mais je sais que la commission scolaire en reçoit. Elle nous a demandé de décrire les mesures sanitaires que nous déployons. Pour nos deux berlines en circulation depuis hier, ce sont les chauffeurs qui ont appelé les parents, comme c’est souvent le cas avec ce type de transport. On a les prévenus que le chauffeur allait porter un masque et des gants, et on demande que les enfants se soient lavé les mains avant d’embarquer. On les rassure aussi en indiquant que le véhicule est désinfecté chaque matin et chaque soir.

V.P.

Comment se passe la relation avec les chauffeurs du scolaire qui ont dû être mis à pied ?

K.P.

Nous avons reçu le plein montant des commissions scolaires pour pouvoir les payer pendant plusieurs semaines. Quand cela s’est arrêté, Autobus Paquette a prolongé d’une semaine à pleine rémunération. Mais quand on a vu que ça arrêtait pour de bon, on a malheureusement dû les mettre à pied. On n’avait pas le choix. On a tenu à garder un lien d’emploi régulier avec notre centaine de chauffeurs. Une ou deux fois par semaine, on appelait ou on envoyait un courriel pour prendre des nouvelles de leur santé et s’ils tenaient le coup financièrement. On répondait à leurs questions sur les mesures d’aide gouvernementale. Je dois dire que beaucoup d’entre eux ont eu l’impression d’être des rejets du système alors que les concierges, les brigadiers, les enseignants continuent à recevoir leur plein salaire. Cette frustration a contribué à ce que deux chauffeurs quittent le métier.

V.P.

Comment voyez-vous la prochaine rentrée scolaire ?

K.P.

On entrevoit une terrible pénurie de chauffeurs pour la prochaine année scolaire. Il y a des opportunités d’emploi, dans les CHSLD et ailleurs. Nos gens aiment prendre soin des petits; cette sensibilité leur donne aussi le profil pour aller s’occuper des personnes âgées. Une conductrice nous a déjà quittés pour un CHSLD. Elle faisait un travail remarquable, mais a fait le saut pour des raisons de salaire. De plus, cette année, on a eu huit départs à la retraite au lieu d’un ou deux habituellement. Beaucoup de nos chauffeurs sont retraités et, avec les risques, certains préfèrent arrêter. Pour beaucoup d’entre eux, ce métier est aussi un passe-temps et ils n’iront pas jusqu’à mettre leur vie en péril.

V.P.

Que pouvez-vous faire pour contrer cette pénurie ?

K.P.

Le grand nombre de mises à pied dans la société représente aussi une opportunité. Mais on ne se cache pas que ce sera difficile de recruter de nouvelles personnes. Actuellement, on ne peut pas faire de formation pratique et les examens à la SAAQ sont retardés. Alors, on mise sur nos chauffeurs actuels en gardant un lien d’emploi pour limiter les dégâts. Et on demandera à nos chauffeurs occasionnels d’en faire un peu plus à la rentrée jusqu’à ce qu’on puisse engager et former du monde. La pénurie de personnel était l’enjeu majeur avant la pandémie, elle l’est encore plus.

On a tenu à garder un lien d’emploi régulier avec notre centaine de chauffeurs. Une ou deux fois par semaine, on appelait ou on envoyait un courriel pour prendre des nouvelles de leur santé et s’ils tenaient le coup financièrement.

Kim Paquette