
Les vibrations sont un risque ergonomique pouvant causer d’importantes atteintes à la santé qui rendent certaines tâches au travail plus difficiles à réaliser. Les problèmes de santé développés peuvent diminuer la dextérité et rendre la manipulation des objets plus difficile. La préhension d’outils et la capacité de travailler au froid peuvent être altérées de façon irréversible et des douleurs au dos peuvent se développer.
Ces problèmes de santé peuvent avoir des impacts non désirés et permanent dans la vie de tous les jours, rendant certaines activités courantes plus difficiles, comme se raser, boutonner sa chemise, ou faire des activités à l’extérieur, comme jouer au golf.
Ou se trouvent les vibrations dans mon lieu de travail ?
Les vibrations peuvent notamment être générées par le poste de conduite d’un véhicule ou par des outils à main portatifs. Les vibrations se divisent en deux catégories, les vibrations transmises à l’ensemble du corps (VEC) et les vibrations mains-bras (VMB).
Les vibrations transmises à l’ensemble du corps (VEC) sont présentes au poste de conduite des autobus, des mini-bus, des micro bus et des berlines. Les vibrations du moteur et les chocs dus à la chaussée cahoteuse se transmettent au corps entier par l’assise vers la colonne vertébrale.
Les vibrations main-bras (VMB) touchent les membres supérieurs, elles sont générées par des outils à main ou des machines portatives, dont les meuleuses, les perceuses, les clés à choc pneumatique et bien d’autres encore. Les vibrations passent par la paume des mains et traversent les doigts, les poignets et les bras.
Quels sont les effets des vibrations sur la santé
Les vibrations transmises au corps peuvent affecter diverses structures des membres supérieurs, inférieurs, du tronc, et causer des troubles au niveau des systèmes neurologique (nerfs), vasculaire (vaisseaux sanguins) et musculosquelettique.
1. Vibrations corps entier (VCE)
Les VCE peuvent toucher les conducteurs et les conductrices de véhicules de transport tels que les autobus, les mini-bus et les berlines.
La source des vibrations dans les véhicules provient principalement des moteurs, et des routes cahoteuses qui transmettent des chocs au poste de conduite. Cependant, le siège du conducteur joue un rôle essentiel d’absorption/amortissement des vibrations. Un siège mal ajusté ou une suspension défectueuse, permettent aux vibrations de traverser l’assise et de se transmettre au corps, par la région du fessier et monter à la colonne vertébrale et aux épaules/cou.
Effets sur la santé
Les vibrations sont un des facteurs ergonomiques pouvant provoquer des maux de dos touchant aussi bien le bas du dos que les épaules et le cou. Ils peuvent également aggraver les blessures préexistantes et être la cause de lombalgies, d’hernie discale, de la sciatique, et même de dégénérescence de la colonne vertébrale (arthrose).
D’autres effets sont possibles sur le système digestif, le système vasculaire périphérique (varices) et le système reproducteur féminin. Les VCE peuvent également avoir des effets sur la grossesse et le fœtus de la femme enceinte.
Les effets des vibrations transmises à l’ensemble du corps se développent lorsque l’exposition est longue et lorsque les vibrations ont une grande intensité.
2. Vibrations main bras (VMB)
L’utilisation régulière d’outils émettant des vibrations, portatifs ou fixes, d’outils guidés à la main (ponceuse à la main) ou le fait d’être en contact avec une pièce vibrante (meuleuse), peut provoquer l’apparition de problèmes de santé au niveau des membres supérieurs. L’ensemble de ces affections sont rassemblés sous le terme de syndrome vibratoire mains-bras (SVMB). Il y a trois types d’atteinte à la santé possible, au niveau neurologique, vasculaire et musculosquelettique.
Troubles nerveux
Les atteintes neurologiques dues aux vibrations peuvent causer des engourdissements, des picotements, la perte de sensibilité et de dextérité aux doigts.
Trouble vasculaire
Le phénomène de Raynaud est une atteinte aux vaisseaux sanguins qui se caractérise par des épisodes de blanchiment d’un ou de plusieurs doigts accompagnés de picotements. Il peut survenir lors d’une exposition au froid et à l’humidité.
Trouble musculosquelettique
Le syndrome du canal carpien est une affection fréquente dont la cause est due à une posture contraignante du poignet, à la préhension d’outils et aux mouvements répétitifs. Cette affection peut créer une limitation du mouvement, des douleurs et des raideurs aux mains et aux bras.
Le SVMB est une maladie irréversible. Il n’existe pas de traitement curatif, les traitements servent uniquement à soulager les symptômes. C’est pourquoi la prévention est primordiale.
Facteurs aggravants
De façon générale, l’atteinte à la santé augmente lorsque le travailleur est exposé à plus d’un facteur de risque tout en étant exposé à des vibrations. Les facteurs suivants devraient être pris en compte lors de l’analyse du risque :
- Une mauvaise posture pendant la conduite ou le fait de rester assis pendant de longues périodes sans changer de position;
- Un ajustement inefficace de la suspension du siège;
- Un outil dont le poids ou la configuration sont problématiques;
- Des méthodes et une organisation du travail déficiente ou contraignante;
- L’entretien préventif de l’outil et des accessoires déficient;
- Le travail avec des outils vibrants dans un environnement froid ou humide (phénomène de Raynaud);
- La nécessité d’exercer une force sur l’outil (pousser) ou encore l’utilisation des outils à bout de bras.
Travailler à la source et sur les facteurs aggravants permet d’améliorer le travail et de réduire les risques à la santé.
La réglementation
L’article 51 de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST) exige de l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique et psychique du travailleur. L’employeur doit notamment éliminer les risques pouvant affecter la santé et la sécurité du travailleur.
La règlementation québécoise (RSST) ne précise pas encore de norme portant sur l’exposition aux vibrations, il est toutefois important de se référer à la norme internationale ISO5349, Vibrations mécaniques, et aux directives européennes 2002/44/EC, qui sont souvent utilisées comme références dans le domaine des risques dus aux vibrations.
La directive européenne, basée sur la norme ISO, propose deux niveaux d’exposition, comme suit :
- Un seuil d’action d’exposition journalière (8 heures) de 2,5 m/s², à partir duquel il est recommandé de mettre en place des mesures pour réduire les risques ;
- Une valeur limite d’exposition journalière (8 heures) de 5 m/s², qui ne devrait pas être dépassée afin de protéger la santé des travailleurs.
De façon générale, le risque d’atteinte à la santé augmente en fonction du temps d’exposition aux vibrations et de l’intensité des vibrations émises par les outils. Il est aussi reconnu que diminuer le niveau vibratoire d’un outil permet de réduire considérablement la dose vibratoire reçue par le travailleur.
Comment peut-on prévenir les risques d’exposition aux vibrations ?
Plan d’action
Afin de contrôler le risque dû aux vibrations, un plan d’action de maîtrise du risque doit être élaboré et mis en place. Identifier des responsables dès le début du projet et impliquer des travailleurs et des représentants de l’employeur. Dresser une liste des principales sources de vibrations, puis, procéder au classement des outils vibrants par secteur. Dans l’atelier de réparation, le mécanicien en chef peut dresser la liste et vérifier les niveaux vibratoires produits par les outils auprès du fournisseur, et dans les manuels du fabricant. Un travailleur pourra vérifier chaque poste de conduite et inscrire dans une liste l’état des sièges et de leur suspension. Noter tous les outils et les postes de conduites qui nécessitent des réparations ou de l’entretien et inscrivez-les dans votre programme d’entretien.
Les mesures sont-elles nécessaires ?
En pratique, il n’est pas toujours nécessaire de procéder à des mesures de vibrations. Il est possible d’obtenir l’information voulue par d’autres moyens, en faisant circuler un questionnaire ou en organisant des entrevues auprès des travailleurs. Si les travailleurs se plaignent de sensations de picotement (VMB) ou de maux de dos (VCE), il faut procéder à l’identification des outils/machines qui provoquent ces inconforts
Est-il important de connaître les heures travaillées avec les outils ?
Lorsque la situation le demande, il est souhaitable de procéder à une estimation des niveaux d’exposition aux vibrations des travailleurs (nombre d’heures d’utilisation). Cela peut révéler que l’outil utilisé émet trop de vibrations pour le nombre d’heures d’utilisation. Il sera souhaitable de réduire les heures d’utilisation avec cet outil ou d’en choisir un autre qui transmet moins de vibrations au corps.
Quels sont les moyens préventifs à mettre en place ?
Il y en a plusieurs, mais certains sont plus efficaces que d’autres parce qu’ils abordent le problème des vibrations à la source, en l’éliminant ou en réduisant considérablement les vibrations émises. Voici les moyens de prévention possibles selon l’approche graduée.
- Lorsque c’est possible, changer le procédé pour éliminer à la source le risque d’exposition aux vibrations;
- Intégrer dans la politique d’achat le choix d’outils dont le niveau vibratoire est réduit;
- Mettre en place un programme d’entretien préventif;
- Procéder à l’ajustement adéquat des postes de conduite, incluant la suspension;
- Certains fabricants offrent des modèles possédant des mécanismes qui réduisent les vibrations, comme une masse autoéquilibrante ou une poignée antivibrante;
- Le port de gants antivibratoires permet d’atténuer les vibrations à la paume, mais pas aux doigts;
- Les gants qui protègent du froid atténuent les symptômes existants;
- Il est préférable de guider un outil vibratoire plutôt que de la pousser.
Ces actions permettent de diminuer les vibrations transmises aux travailleurs, il est important de retenir que bien que la norme ISO5349 a établi des seuils de travail acceptables sur une période de 8 heures, certaines personnes peuvent ressentir de l’inconfort lors d’une utilisation au-dessous de ces seuils prescrits.
Pour protéger la santé des travailleurs et travailleuses, la formule gagnante est de réduire à la fois l’exposition aux vibrations et les vibrations de l’outil.
Via Prévention est un organisme qui œuvre pour améliorer la santé et la sécurité au travail dans le secteur du transport, de l’entreposage et de l’environnement. Les conseillères et conseillers à la prévention peuvent vous aider par de nombreux services, tels que le conseil, l’information et la formation. Tous les établissements classés dans le transport de personnes sont membres de Via Prévention. N’hésitez pas à nous appeler si vous avez des questions sur comment prévenir les lésions professionnelles dans votre établissement.
Vous pouvez également lire cette article dans le magazine Le Transporteur, Printemps 2025, édité par La fédération des transporteurs par autobus.