Le Centre de formation en transport de Charlesbourg avait dû fermer ses portes, comme toutes les écoles. Elles sont maintenant entrouvertes. Comme toutes les organisations qui reprennent, avec la ferme intention de faire entrer l’activité tout en laissant le virus à l’extérieur. Comment s’y prendre? Comment les élèves réagissent-ils? Et qu’en est-il du service aux entreprises? Eddy Vallières, le directeur du Centre, a bien voulu nous en parler.
Via Prévention
Vous avez repris vos activités. Comment ça se passe à l’école?
Eddy Vallières
Notre réouverture se fait en trois phases. Nous sommes dans la phase 1, où les élèves qui étaient en cours avant la crise reviennent compléter leur formation. La phase 2 verra entrer les élèves acceptés mais qui n’avaient pas encore entamé leur formation. La phase 3 sera de rouvrir les inscriptions régulières. Pour officialiser les dates des phases 2 et 3, nous attendons les confirmations du ministère de l’Éducation. Mais, d’ores et déjà, nous savons que nous devons former à distance pour la partie théorique et en présentiel avec distanciation pour les contenus pratiques. En espérant que les élèves potentiels soient attirés par cette nouvelle méthode.
V.P.
Avec les importantes mises à pied temporaires dans le secteur du camionnage en raison du ralentissement économique, comment se sentent les élèves?
E.V.
La grande difficulté se situe au niveau des stages. Les entreprises, et c’est tout à fait logique, vont prioriser le retour de leurs chauffeurs avant de faire entrer des stagiaires finissants. Même si le transport est demeuré essentiel, en particulier dans l’alimentaire, il ne faut pas oublier que, par exemple, les restaurants ne commandent plus beaucoup. Le milieu a été très touché par ce ralentissement soudain.
V.P.
La reprise amène-t-elle de l’optimisme quant aux débouchés?
E.V.
On peut anticiper que des chauffeurs plus âgés vont vouloir prendre leur retraite. C’est ce qui est arrivé chez nous avec certains enseignants. Probablement que, dès que ça va redécoller, on va avoir des besoins de main-d’œuvre importants. Il demeure qu’actuellement c’est plus difficile pour les stages. On se doit d’en informer nos élèves et, la semaine dernière, il y eu 20 abandons d’étudiants inscrits.
V.P.
Comment ça se passe, concrètement, pour le respect des consignes sanitaires?
E.V.
Avant la reprise, on est allé chercher les recommandations de la CNESST pour le transport par camion dans les métiers de la construction, puis celles du transport scolaire et, finalement, celles pour les camionneurs en milieu local régional. À partir de là, on s’est bâti une procédure qui a été validée par la santé publique puis par l’inspecteur de la CNESST qui a fait le tour des commissions scolaires. On a modifié nos ratios d’élèves par enseignant pour n’avoir qu’un seul élève dans la cabine avec le professeur ou seul dans le camion quand ils ont leur permis de conduire, avec le professeur dans un véhicule accompagnateur. La cabine est désinfectée entre chaque élève et on fournit des ÉPI.
V.P.
Avez-vous aussi installé une barrière physique dans la cabine?
E.V.
En fait, c’est un rideau transparent entre les sièges avant qui respecte les normes de la SAAQ. Ce rideau part du plafond jusqu’au bas du siège et sur sa largeur. On applique aussi une procédure pour que de l’air frais de l’extérieur circule à l’intérieur du véhicule.
V.P.
Avez-vous également recommencé les formations en entreprises?
E.V.
Non, nous ne nous déplaçons pas, car toutes les conditions favorables ne sont pas réunies. Je vous avouerais que, dans la plupart des entreprises, les chauffeurs ne sont pas chauds à l’idée de faire embarquer un formateur dans leur camion. Nous encourageons plutôt l’utilisation de Circuit, notre portail de formation en ligne, au circuit.cftc.qc.ca. De toute façon, s’il s’agit d’obtenir une nouvelle classe de permis, ce n’est pas possible, car la SAAQ n’est pas encore ouverte pour ce service de nouvelles classes. Notre rôle de mandataire se limite à la délivrance de permis uniquement pour des inscrits en DEP. Les autres personnes doivent attendre, c’est aussi vrai pour celles et ceux qui voudraient un permis de véhicule de promenade.
V.P.
Allez-vous modifier le contenu SST des cours pour intégrer le risque infectieux?
E.V.
On a du désinfectant dans les cabines et des procédures très strictes. On espère que cela va se maintenir par la suite dans les entreprises, car il s’agit de saines habitudes de vie. J’ajouterais que, ces temps-ci, le fait d’attendre avant d’avoir des produits, le fait d’accepter de ne pas toujours avoir ce qu’on veut quand on en a besoin, pourrait amener les gens à être moins dans la course, à prendre un peu plus de temps pour eux et dans leur travail.
En fin de compte, se créer un meilleur équilibre personnel. Est-ce que notre mémoire collective saura retenir les leçons de cette crise?
Eddy Vallières